Le gabier, amusé et patient, explique Ils saisissent les cargues, drisses ou écoutes selon l'opération à effectuer. Les mains tiennent fermement le bout. Au signal du gabier, ils tirent le filin. L'opération parait simple, en réalité elle demande une certaine technique. D'abord, il faut que les mouvements soient parfaitement synchronisés, sinon les bras des uns gênent les mains des autres et donnent lieu à une jolie pagaille. Le gabier explique tout cela, amusé et patient. Il faut également serrer fortement le filin, sinon, les mains commencent à rougir et finissent par brûler. Il faut ensuite ne pas lésiner sur l'énergie à développer, mais aussi savoir se préserver et garder suffisamment de force pour la voile suivante... Il faut enfin faire attention aux consignes de sécurité pour éviter les accidents et surtout prêter attention à la "veuve" sur le gaillard avant, une poulie qui vole au vent et frappe le crâne des hommes au point de rendre leur femme veuve. Pour chaque précaution, pour chaque voile affalée, pour chaque bout tiré, les hommes d'équipage fournissent des explications. Ils lèvent le bras pour indiquer quelle voile a été manœuvrée et quel bout a été utilisé pour cela. Sur le pont les stagiaires suivent ces indications, tentent de se repérer. Ils fixent le bout de son point de départ sur le cabillot à son point d'arrivée dans la mature. |
Tous sont un peu surpris et déconcertés par le nombre important de filins, de poulies et de cabillots de tournage qui servent à la manœuvre. A bord du Belem, il y a 210 points de tournage, plus de 250 poulies et prés de 4 500 mètres de filin. Des nombres qui peuvent effrayer l'apprenti gabier au point de le décourager. Le commandant les rassure. Aux questions techniques des experts sur la force du vent, il répond technique : "La force exercée par le vent est toujours perpendiculaire au plan sur lequel elle s'exerce". Aux débutants, il répond calmement "On connaît un bateau et on apprend à naviguer dessus au nombre des manœuvres que l'on y effectue, pas au temps que l'on y passe embarqué". Et pour rassurer un peu plus les uns et les autres. Il décide de faire visiter le bateau. Les stagiaires sont répartis en groupe. Ils partent effectuer une première découverte sous les explications d'un gabier. Les uns se dirigent à l'avant, les autres montent sur le roof.. "Le Belem est un trois mâts à voiles carrées, commence-t-il, le premier mât, plus petit, est le phare de misaine, le second est le grand phare, poursuit un gabier, sur chacun de ces deux mâts il y a cinq voiles misaine, petit hunier fixe, petit hunier volant, petit perroquet et petit cacatois pour le phare de misaine... grand voile, grand hunier fixe, grand hunier volant, grand perroquet et grand cacatois pour le grand mât et brigantine et flèche pour le phare d'artimon... A ces voiles, s'ajoutent les focs les voiles d'étai du grand phare et d'artimon... les stagiaires écoutent attentivement la description, jusque là tout parait simple. Le gabier poursuit ses explications mais plus lentement cette fois-ci car les données vont se compliquer. "Vous avez tout à l'heure hissé les vergues puis elles ont été brassées (placées dans le sens du vent), les voiles ont ensuite été dé rabantées. Les voiles carrées sont équipées d'un système d'étouffoir constitué par des cargues. Ce sont des filins frappés sur les ralingues de la voile (bordure, chute) et qui, une fois, pesés, ramènent la voile sur la vergue pour être plus facilement serrée... Les filins des cargues du phare de misaine sont manœuvrés sur les cabillots situés à l'avant du pont... Les stagiaires sont un peu perdus. Le gabier, habitué, répète une seconde fois, puis une troisième. A la fin, les stagiaires confirment mollement qu'ils ont bien compris en faisant un timide signe de la tête. "Rassurez-vous, le navire étant symétrique, on trouve à quelques exceptions près, les mêmes manœuvres de bâbord à tribord, ce qui réduit le nombre de cabillots à connaître par cœur". Les stagiaires ne sont pas pour autant rassurés. "Vous allez vous y faire, insiste le gabier, le capitaine va donner les ordres de la manœuvre, en agissant, vous comprendrez mieux". Et les manœuvres seront longues sur le pont, pas moins d'une heure trente sont nécessaires pour affaler toutes les voiles. Les gestes vont se suivre et se répéter jusqu'à ce que les 21 soient mises au vent. Par petits groupes, toujours sous la responsabilité d'un gabier, les stagiaires se mettent en place. |
Souvent ils s'emmêlent, suivent un autre bout... Difficile parfois de comprendre qu'en tirant un bout d'un côté, on affale une voile de l'autre... Mais en fin de compte, les apprentis gabiers comprennent mieux, sont plus précis dans leurs gestes, plus sûrs dans leurs démarches... Ils sont aussi plus fatigués, certains même paraissent exténués. Les 1 200 m 2 de voile sont développés. Et pourtant, les opérations ne sont pas complètement terminées. Il faut ranger le pont. Rien ne doit traîner sur le plancher du bateau pour éviter notamment les chutes. |